YouTube : désinformation et lobbying contre la réforme du droit d’auteur

Le 12 septembre dernier, le parlement européen a adopté une proposition de réforme du droit d’auteur dans l’Union Européenne au grand dam des GAFA. Ce texte favorable aux auteurs est contesté par les grands acteurs du web au motif qu’il briderait et censurerait la liberté de création.

Ce qui chiffonne les GAFA

Deux articles en particulier sont dans le collimateur des GAFA :

  • l’article 11 qui met en place un droit voisin pour la presse et qui apporte une protection aux entités et personnes qui participent à la création d’articles,
  • l’article 13 qui oblige les plateformes à retirer de leurs sites les contenus protégés par le droit d’auteur mis en ligne illégalement.

Ce second article concerne donc spécifiquement la création artistique et les scénaristes en particulier.

Mais en quoi YouTube et consorts jugent-ils cet article liberticide ? Selon eux, lorsque l’article 13 sera appliqué, il ne sera plus possible de publier quoi que ce soit sans que cela ne soit passé au crible d’une terrible intelligence artificielle qui, dans le doute, censurera à coup sûr tout ce qui lui est soumis.

Des arguments fallacieux

Forcément expliqué comme ça, on ne peut qu’approuver leur opposition au texte. Ce qui est grandement mensonger est que YouTube, notamment, possède déjà des algorithmes capables de détecter dans les vidéos postées des contenus soumis aux droits d’auteurs. Pourtant, actuellement, si aucun ayant droit ne réclame la suppression d’une vidéo lui portant préjudice, celle-ci reste active et visible par tous. Avec l’application de l’article 13, dès qu’une vidéo présentant des contenus protégés sera détectée, la plateforme sera obligée de contacter l’ayant droit lésé et de lui proposer soit de monnayer la vidéo et lui reverser une quote-part, soit de supprimer la vidéo, soit de ne rien faire. Finalement, aucune atteinte à liberté de créer. Seulement une meilleure protection et rémunération des ayants droit.

Autre argument fallacieux porté par les GAFA, le droit à la parodie et à la citation disparaitrait aussitôt avec la promulgation de l’article 13. Là encore, c’est extrêmement exagéré. En effet, chaque fichier numérique possède sa signature propre en fonction de ce qu’il contient. Et c’est cette signature que les fameux algorithmes cités précédemment vont analyser et comparer à leurs bases de données de contenus protégés pour déterminer si une vidéo enfreint les règles du droit d’auteur ou pas. Une vidéo parodique reprendra très probablement certains éléments de l’œuvre à laquelle elle fait référence. Mais sa signature révélera des différences par rapport à l’original et permettra de clairement la distinguer.

Toutefois, en cas d’algorithme trop grossier, il pourra être possible que la vidéo parodique puisse être supprimée. Ce cas a également été prévu dans l’article 13. L’utilisateur dont la vidéo a été supprimée pourra en contester le retrait directement auprès de la plateforme responsable ou le cas échéant, auprès d’un juge. Ce qui n’est absolument pas le cas actuellement. Par exemple, sur YouTube, à moins d’être YouTube Creator avec plusieurs milliers d’abonnés, il est extrêmement difficile de contester la suppression d’une vidéo, même si celle-ci n’enfreint ni le droit d’auteur ni le règlement de YouTube.

Cette disposition servira également pour le droit à la citation, notamment pour des vidéos de critiques de films ou d’analyse filmique.

La proposition de réforme est favorable au droit d’auteur sans être liberticide

La proposition de réforme proposée par le Parlement Européen renforce donc bien le droit d’auteur sans porter aucune atteinte à la liberté de création. Alors pourquoi les GAFA s’opposent-ils au texte ? Tout simplement pour des raisons financières. Car qui dit meilleure protection du droit d’auteur, dit meilleure rémunération. Rémunération versée par les plateformes vidéos. Ce qu’elles refusent absolument. “Les revenus de la publicité d’accord, le versement des droits d’auteurs, ben, euh… non.”

Car le débat continue et la bataille fait rage. Le texte approuvé par le Parlement Européen doit encore être ratifié par chaque Etat membre. En France, et dans les autres pays européens, une vaste campagne de lobbying lancée par YouTube sur les réseaux sociaux a actuellement lieu. Le but, que les Etats renoncent à retranscrire le texte européen en loi nationale. Fait très étrange, cette campagne est relayée par de nombreux YouTubers influents dont les revenus proviennent pour partie de leurs droits d’auteurs. Les autres parties étant la publicité et parfois une rémunération directe de la plateforme. Nous pouvons donc trouver surprenant que des créateurs bien lotis du web crient haro sur une loi améliorant la protection de l’ensemble des auteurs.

 

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